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La marée rouge vue de Québec

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À première vue, le premier ministre Couillard a de quoi se réjouir des résultats des élections fédérales. Justin Trudeau a indiqué qu’il voulait agir avec davantage d’ouverture dans sa façon de pratiquer le fédéralisme, et cela paraît relativement prometteur dans le dossier des changements climatiques.

À ce chapitre, les Couillard et Trudeau affichent une même détermination sur papier, bien que, concrètement, il n’est pas clair dans quelle mesure ces deux administrations réagiront concrètement aux projets de transport et d’exploitation des hydrocarbures au Québec et dans le reste du Canada.

Pour les transferts en santé, Justin Trudeau rejette l’approche unilatérale du gouvernement Harper et se dit prêt à discuter avec les provinces. Mais il insiste davantage, dans sa lettre qui répond aux demandes de Philippe Couillard, sur l’innovation que sur des injections importantes de fonds, comme le réclame Québec.

Dépassé sur sa gauche

Le plus évident de ces points de discorde entre les deux hommes est lié à l’économie et aux finances publiques. Philippe Couillard s’emploie à gratter les fonds de tiroir et réduit les dépenses en éducation bien en deçà de l’inflation tout en prétendant qu’il ne pratique pas une politique d’austérité. En revanche, Justin Trudeau plaide pour des déficits modestes pour relancer l’économie, avec un Ontario qui est parfaitement au diapason avec une politique économique expansionniste.

Philippe Couillard se fait aussi dépasser sur sa gauche par Justin Trudeau dans le dossier des retraites publiques (un régime plus généreux est envisagé en Ontario et peut-être ailleurs au Canada, mais pas au Québec). Quant au dossier de la marijuana, le PM du Québec est contre la légalisation et veut s’en tenir à la décriminalisation, sans parvenir à expliquer clairement son point de vue, même si quelques États américains sont déjà engagés sur la voie de la légalisation.

Moins libéral que les libéraux fédéraux

À propos du niqab, Justin Trudeau est limpide et rejette toute interdiction. Il l’a répété le soir de son élection. Pour sa part, Philippe Couillard se retrouve maintenant dans le rôle de celui qui veut interdire, peut-être au détriment de la Charte des droits et libertés, cette pièce de vêtement qui couvre le visage et le corps. En théorie, Philippe Couillard pourrait bénéficier sur cette question d’un appui populaire au Québec, bien que, jusqu’à présent, il n’y a que Mario Dumont qui soit parvenu à profiter bien temporairement (et il y a déjà 8 ans) du débat identitaire au Québec.

Et Philippe Couillard veut interdire le niqab – un outil d’oppression des femmes qui n’a rien à voir avec la religion, a-t-il répété en anglais au lendemain du scrutin fédéral – même s’il s’empêche d’interdire le tchador, qui couvre tout le corps, mais pas le visage. Doit-on comprendre que, pour cette raison, le tchador ne serait pas un outil d’oppression? Le tchador, dans l’esprit du premier ministre Couillard, serait-il une véritable pièce de vêtement à caractère religieux? Tout cela paraît bien spécieux, surtout à la lumière de décisions de la Cour suprême sur la liberté de religion.

À l’ombre d’Ottawa

La première ministre de l’Ontario, Kathleen Wynne, a jugé bon de se ranger aux côtés de Justin Trudeau, et tout indique qu’elle a remporté son pari sur tous les tableaux. Justin Trudeau deviendra premier ministre d’un gouvernement majoritaire avec forte représentation ontarienne.

Philippe Couillard ne peut pas en dire autant. La conséquence sera-t-elle que le Québec passera après l’Ontario à Ottawa? En tout cas, l’inverse paraît peu probable.

Le nouveau gouvernement de Justin Trudeau risque d’obtenir une partie appréciable de l’espace médiatique. Les nouveaux ministres fédéraux seront nécessairement plus présents que leurs prédécesseurs conservateurs. Dans certains cas, ça se fera au détriment des ministres libéraux québécois, qui seront moins sous les feux de la rampe.

L’éclat du nouveau premier ministre et de sa famille, qui prendront place au 24 Sussex, pourrait rendre bien terne un premier ministre Couillard qui n’affiche, pour le moment, que des ambitions comptables.

Les gouvernements libéraux à Québec ont rarement bénéficié de la présence d’un gouvernement rouge à Ottawa. Face au fils de Pierre Trudeau, le fédéraliste convaincu qu’est Philippe Couillard devra jauger la façon dont il commandera sa barque constitutionnelle, dont il se plaît à agiter les voiles, malgré qu’il sache qu’elle est toujours en cale sèche. Est-ce qu’un jour viendra où Philippe Couillard sera contraint de manifester des velléités nationalistes pour rassurer les Québécois à l’égard de Justin Trudeau et retrouver une place au soleil?

Tout nouveau, tout beau

Le nouveau premier ministre paraît promis à une lune de miel qui, par la force des choses, ne durera qu’un temps. Philippe Couillard sait bien qu’un jour ou l’autre, Justin Trudeau perdra du lustre, d’autant que son propre gouvernement a subi une importante métamorphose en une seule nuit, en raison de l’arrivée de Justin Trudeau.

Le gouvernement Couillard apparaît tout à coup plus beige et sans vertu progressiste, comme si l’on se rendait compte davantage de certains plis du gouvernement du PLQ que l’on associait jusqu’à présent au gouvernement conservateur de Stephen Harper.


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